
Un grand vide trône désormais au cœur de mon village. Il faudra s’y faire…
Jusqu’à ce 28 mai 2016, Falardeau partageait un point commun avec Paris. Quand on est à Paris, peu importe où l’on se trouve dans la ville, on aperçoit la tour Eiffel. À Falardeau, c’était l’église, le plus haut bâtiment du village, que l’on voyait de partout.
Inaugurée le 24 décembre 1967, cette église avait une forme de cône inversé qui s’est avérée avant-gardiste pour son époque. Il n’y avait d’ailleurs aucune église comme la nôtre.
Malheureusement, c’est peut-être pour ça qu’elle a connu son triste destin. Un bâtiment d’une forme pareille nécessite un entretien particulier.
Le maintien du bâtiment dans sa forme coûtait trop cher pour que l’aventure en vaille la peine. Tout a été fait pourtant pour qu’il soit gardé. On a pensé changer sa vocation, on a même eu l’idée d’en faire un gymnase municipal, mais on a préféré en construire un tout neuf juste à côté.
Les Falardiens sont depuis toujours attachés à leur église. Avant sa démolition, elle était un repère visuel qu’on pouvait voir de loin, un peu comme un phare qui, de sa présence rassurante, veillait sur le village comme un gardien.
Maintenant que l’église n’est plus, c’est grâce aux souvenirs que les Falardiens y ont vécu qu’ils manifesteront leur attachement à ce bâtiment qui fait maintenant partie de la légende.
Tout le monde se souvient d’y avoir vécu un mariage, un baptême, une première communion, une confirmation. Tout le monde se souvient d’y avoir aussi pleuré la mort d’un proche lors de ses funérailles. Des souvenirs qui s’accumulent par dizaines dans la mémoire des citoyens de mon village.
Si son extérieur était unique, l’acoustique à l’intérieur était unique en son genre, se définissant par un écho qui lui donnait des allures de temple secret.
Si les gens aimaient bien s’y rendre, c’est grâce à la chaleur des retrouvailles qu’elle permettait. Et l’été, les nombreux villégiateurs présents chez nous tonifiaient notre vie paroissiale, à une époque où il y avait deux messes le dimanche, la première à 9:30 et la deuxième à 11:00. Et à la sortie de la messe, il y avait toujours un camelot pour nous vendre un Progrès-Dimanche.
Avec le temps, la pratique religieuse a diminué, victime d’un désintérêt de la part de croyants las d’être associé à une religion qui n’a pas su se renouveler et qui n’a qu’elle-même à blâmer pour son propre déclin. Même si certains ont continué à pratiquer leur religion malgré tout, l’église se vidait de plus en plus, et la jeunesse du village l’avait pratiquement désertée.
On la voyait bien se remplir lors de mariages, de baptêmes et de funérailles, de même qu’à Noël et à Pâques, mais ce n’était pas trop long avant que le naturel et la tendance lourde ne reviennent au galop. Rajoutez à ça les problèmes structurels de plus en plus complexes pour l’entretien et vous avez tout ce qu’il faut pour placer une communauté devant des choix déchirants.
En juin 2014, l’église était en si mauvais état qu’elle fut fermée pour des raisons de sécurité. Les offices dominicaux ont donc été déplacés soit au Domaine des Pins – la résidence locale pour personnes âgées – ou à la salle des Chevaliers de Colomb, selon les circonstances.
Quant aux mariages, baptêmes et funérailles, ils ont lieu à St-Honoré, la ville voisine, où se trouve une plus grande église en meilleur état.
Bientôt, un centre communautaire s’élèvera sur le terrain où l’église était située. Les Falardiens pourront s’y réunir comme ils aimaient bien le faire dans le temps où ils pouvaient le faire dans une église qui était la leur. Mais ce ne sera plus pareil…
Saint-David est mort, mais pas Falardeau.
C est tellement beau ,raconté avec humour ,toutes les années passent sous nos yeux en te relisant ,,,bravo ,,,tu as une belle plume ,,,,