Alexandre Cloutier est député de Lac St-Jean pour le Parti Québécois. Âgé de 37 ans, il vient d’être réélu pour un quatrième mandat consécutif lors des élections du 7 avril dernier, et il vient d’annoncer sa candidature à la chefferie du Parti Québécois.
Bref, c’est un gars de mon âge! Quelqu’un avec qui j’aurais pu aller au cégep ou à l’université. Quelqu’un qui a un cheminement scolaire normal et un parcours de vie normal, alors que moi j’essayais plein d’affaires dans toutes sortes d’universités, ne complétant rien, ne comptant que sur mes cours dans mes matières préférées – la radio et le journal étudiants – pour avoir un peu de plaisir dans cette vie étudiante qui ne voulait pas dire grand-chose à une époque où je ne savais pas trop où m’enligner, ce qui explique en très grande partie la dette étudiante faramineuse que j’ai contractée.
Je regarde aller Alexandre Cloutier de la même façon que je vois aller d’autres de mon âge, qui ont de belles études, de beaux parcours, un certain prestige. Et je me compare après. Peut-être ne devrais-je pas, car chacun à sa route, mais je le fais quand même.
L’exercice s’avère toujours sadomasochiste, car il finit toujours par me faire un peu mal. Ah! Si seulement j’avais fait telle ou telle chose à tel ou tel autre moment, peut-être les choses auraient-elles été différentes? Qu’importe, mon histoire jusqu’à maintenant est déjà écrite et il n’y a pas de moyen de la réécrire.
Cependant, il y a toujours moyen de prendre le taureau par les cornes et d’aligner sa vie vers une direction plus conforme à celle que l’on espère. Et c’est quand je prends compte de cette réalité que je me remets à sourire, me disant que je suis présentement au beau milieu d’une chance inégalée pour réussir ce retournement espéré.
Chaque matin, je me lève libre, maître de mon destin, sachant que chaque geste que je poserai le sera dans un but noble, celui de tailler ma vraie place dans ce monde. La recette pour y parvenir est à la fois simple et compliquée : il ne suffit que de suivre son instinct et de se respecter, car pour être respecté d’autrui, il faut d’abord se respecter soi-même, sans compromis, quoiqu’en dise autrui.
Ce ne sont pas les autres qui vivent notre vie, alors à quoi bon se laisser berner par tous ceux qui sont bien dans leur 9 à 5 et qui pensent que si c’est bon pour eux, que c’est bon pour moi?
On m’a suggéré de quitter ma terre natale pour aller répondre au téléphone dans une lointaine contrée. On m’a suggéré d’aller vendre des cellulaires et des plats en plastique à qui en voudrait bien. On m’a suggéré de faire bien d’autres emplois peu ou pas compatibles à la place que j’ai à me tailler maintenant dans le monde, comme si je devais reporter le tout à plus tard comme j’ai fait trop souvent.
Personne ne saurait dire où j’en serais réellement si j’avais décidé plus tôt de faire ce que je fais maintenant. Pas même moi! De toute façon, cela ne changerait rien à la situation actuelle. Il ne reste plus qu’à tirer un trait sur le passé et se dire que le futur commence maintenant, en le bâtissant jour après jour.
Car c’est ainsi que chacun taille sa place dans le monde, en dépit de tout ce qui pourrait l’en empêcher ou le décourager…
« Un colonisé c’est
Un homme dépersonnalisé
Qui parle, s’habille comme son maître,
Le singe et le lit
Et qui au fond
Le hait et l’envie.
Un homme libre
C’est un homme qui n’a pas honte
De ses père et mère
Ni de son milieu
Qui circule tête haute sur la planète
Commandant le respect et la fierté.
Sois toi-même et le roi te recevra. »
— Félix Leclerc