J’ai fait un certificat en journalisme à l’Université de Montréal, il y a de ça quelques années. J’avais cru que ce serait nécessaire pour moi afin de travailler dans ce domaine. Or, ce n’est pas seulement pas assez, mais j’ai aussi découvert que la passion n’y était plus.
À vrai dire, je me demande même si elle y a déjà été. J’ai bien fait un peu de journalisme dans mes années d’animateur à la radio, et j’y ai quand même eu un certain plaisir, mais jamais au point d’en faire une carrière.
Si j’ai opté pour un certificat en journalisme, c’était parce que l’écrit m’intéressait. Si la carrière en radio m’a laissé une voix qui peut encore être utile, j’ai aussi une plume à qui j’aurais bien aimé donner une chance d’être elle aussi ma planche de survie. J’ai pensé que le journalisme allait être une belle façon d’allier les deux et de bien m’en tirer. Or, je dois admettre que je me suis trompé!
J’ai eu bien beau faire quelques piges journalistiques qui ne m’ont pas rapporté beaucoup d’argent – quand elles en ont rapporté —, mais cela ne m’a pas vraiment encouragé à continuer. Les récentes coupures dans tout ce qu’il y a de média n’ont pas aidé non plus, si bien que j’ai décidé que je ne porterai plus le chapeau de journaliste à compter d’aujourd’hui, décidant de mettre fin à ma carrière journalistique avant même qu’elle n’ait réellement commencé.
J’ai passé les dernières semaines à soumettre des idées de reportages à diverses publications, mais cela n’a donné aucun résultat probant. Ayant un paquet de choses à payer et si peu d’argent qui rentre pour y parvenir, cela a beaucoup affecté ma patience et réduit à néant ce qui me restait de passion pour ce métier, alors que je réalisais du même coup que je n’avais pas du tout les moyens pour ces ambitions.
Je ne suis pas rancunier envers le milieu, je suis seulement réaliste en admettant que je ne suis pas fait pour y briller. À force d’écrire sur ce blogue, je me suis rendu compte que j’aime beaucoup plus créer les histoires que de les rapporter, les vérifier et contre-vérifier chaque fois.
Et à voir ce sur quoi les médias ont fait des reportages ces dernières semaines, j’ose imaginer être bien heureux de ne pas avoir été celui qui les a faites. Je suis devenu aussi cynique envers les médias qu’envers les politiciens, alors pourquoi irais-je alimenter un monstre que je me suis mis aussi à mépriser?
Quand un malheur frappe, une armada de journalistes s’en va toujours sur le terrain pour recueillir le moindre propos et la moindre larme pour les servir à faire du « human interest » pour faire pleurer les matantes de la province au grand complet. Un ancien journaliste – dont je tairai le nom – m’avait confié, après une catastrophe survenue dans son coin de pays, que ça ne lui manquait aucunement d’aller recueillir sur le terrain les commentaires sur le vif des personnes endeuillées et celles qui ont assisté au drame. Je me vois mal faire ce genre de truc sans éprouver un profond malaise vis-à-vis mon métier. C’est dans ce temps-là qu’il est plus sage de baisser pavillon plutôt que de continuer à se faire mal à force de perdre ses illusions.
J’ai essayé, je me suis cassé les dents, mais au moins j’ai essayé. J’ai voulu savoir ma valeur dans ce milieu de plus en plus difficile, et je l’ai sue. La vérité n’est pas belle, mais il faut la voir telle qu’elle se présente, malgré la laideur de son réalisme. Avec toutes ces coupures dans les médias, je risque de moins en moins de pouvoir y faire ma niche, puisque certaines têtes qui seront sacrifiées ont un nom et une crédibilité assez solide qui fera en sorte qu’ils rebondiront facilement ailleurs, ce qui ne fera rendre ma percée dans ce domaine qu’encore plus impossible qu’auparavant.
Il ne reste donc pour ma plume que le chapeau d’écrivain à lui faire porter, le seul chapeau qu’elle aimerait porter de toute façon. Elle s’y sent plus libre avec ce chapeau sur la tête, elle se sent plus elle-même, elle se sent plus équilibrée, plus prête à passer à l’attaque. Elle a assez perdu de temps à porter des vêtements qui ne sont pas faits pour elle, et à qui d’autres – plus talentueux et plus passionnés — sauront très bien s’en accommoder.
Le journaliste en moi est donc officiellement mort. Il laisse sa place à l’écrivain, sauf que l’écrivain doit vivre lui aussi, et c’est désormais ce défi qui alimentera mon quotidien!
Incroyable ce témoignage sur le métier de journaliste… je dois dire que je comprends ce sentiment, je serais moi-même mal à l’aise…
Bonne carrière d’écrivain, dans ce cas !