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Jean voit promener l’amour – Fable des temps modernes (partie 1)

 

« Quand vous irez au bois conter fleurette
Jeunes galants, le ciel soit avec vous
Je n’eus pas cette chance et le regrette
Il est des jours où Cupidon s’en fout. 
»

 

  • Georges Brassens, Cupidon s’en fout

    « À soir c’est mon anniversaire
    Ben oui gard’ donc j’ai 35 ans
    Je l’sais, je l’sais j’en ai pas l’air
    Pis j’t’encore plus jeune par en dedans
    Ouais ben l’amour la mort pis toute
    C’est des questions trop grandes pour moé
    Pis à part de ça le monde entier
    Veut juste savoir combien ça coûte

    C’est à cause de mon répondeur
    Y’a absolument rien s’a cassette
    J’te dis qu’à soir dans mon p’tit coeur
    Y fait frette »

  • Dédé Fortin, Le répondeur

 

C’est une histoire qui arrive un peu trop souvent à Jean. Il voit se promener l’amour autour de lui, le voit viser des gens au point de les atteindre de ses flèches aphrodisiaques qui les fait tomber amoureuses l’une de l’autre pour ensuite s’en aller sans même qu’il ne se soit retrouvé sur le chemin d’une de ces flèches.

 

À la fois impuissant et intrigué par ce phénomène, Jean trouve quand même le moyen d’être heureux pour les personnes à qui ça arrive – après tout, Jean n’est-il pas un homme bon et plein d’amour? – même si, au fond de lui, la frustration et le découragement bourdonnent au point de l’attrister sur son propre sort.

 

Bref, chaque fois que Jean voit promener l’amour autour de lui et qu’il le voit l’ignorer encore une fois, il lui vient une envie folle de l’envoyer promener une fois pour toutes. Mais Jésus n’a-t-il pas déjà dit que ce qu’on fait à un autre, on le fait aussi à soi-même? Jean se souvient alors de ses cours de catéchèse au primaire à l’École Saint-David et se tait, juste pour éviter le mauvais sort que l’amour lui ferait si jamais il osait prononcer la moindre parole défavorable envers lui. Et si tout ça n’était, dans le fond, qu’une prémisse d’une chose à venir, un phénomène dont Jean ignore tout de la forme et de la portée, qui finira bien par le frapper un beau jour? Jean n’en sait rien, ou peut-être se conte-t-il des histoires à dormir debout? Qu’importe, Jean nage dans l’inconnu.

 

Au-delà de tout ça, la vie continue et celle de Jean fait de même. Il gagne modestement sa vie, griffonne des pattes de mouche sur papier, enregistre de la radio de sous-sol pour son plaisir, en espérant que ce plaisir soit partagé par au moins une autre personne dans ce si vaste univers habité par la race humaine. Il mène bien sa vie, ce cher Jean, mais qu’est-ce que l’amour a bien pu lui faire pour avoir une dent contre lui? Posons-nous la question, juste pour le plaisir, même si ce n’est peut-être pas ça le problème, même que ça n’en est probablement pas un.

 

Pour parvenir à répondre à cette énigme, Jean devra faire preuve de décentrement, l’amour ayant refusé toutes les demandes d’entrevue qu’il lui a faites. Se mettant dans la peau de l’amour, il se demande bien ce qu’il ferait à sa place s’il vivait dans ses habits et marchait dans ses souliers. Or, malgré des efforts surhumains, Jean n’a toujours pas réussi à savoir ce qu’il ferait s’il vivait dans le corps et l’esprit de cet être immatériel qui semble fonctionner d’une manière plus ou moins méthodique qui échappe à toute logique préétablie, même à la logique elle-même, peu importe la forme que cette dernière peut prendre. Il échappe même aux progrès technologiques, à internet, aux réseaux sociaux. Il a ses mêmes méthodes depuis des temps si lointains qu’aucun homme ne saurait dire à quand elles remontent, et tient mordicus à les utiliser tant et aussi longtemps qu’il sera sur cette planète. Pourtant, Jean est un homme de son temps. Dès qu’il a appris à surfer sur internet, il s’est mis à clavarder avec plein de monde d’un peu partout, en espérant y trouver le rare filon, celui qui lui permettrait enfin d’entrer dans la planète Amour et son univers aphrodisiaque. Mais l’amour préfère la vraie vie à celle qui se déroule dans les univers parallèles du virtuel. Jean l’a appris à ses dépends, dans une vie antérieure…

La suite, un moment donné…

 

1 réflexion au sujet de “Jean voit promener l’amour – Fable des temps modernes (partie 1)”

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