Vendredi 27 avril 2012. Il est 17h43. J’arrive à mon arrêt habituel d’autobus, celui qui se trouve juste à côté de la gare de train de banlieue en plein cœur de Ville Mont-Royal. Au moment où j’arrive, un de ces nouveaux pachydermes bleus articulés qui servent d’autobus à la STM commence son élan pour rejoindre l’arrêt. Le voyant avancer presque aussi vite que moi, j’accélère le pas. Mais celui-ci ne remarque pas ma présence et passe tout droit à l’arrêt, me laissant dans une colère aussi intense que brève.
M’en retournant vers l’abribus pour attendre le prochain autobus, je remarque un jeune homme d’environ vingt ans qui regarde la scène et qui m’envoie un beau sourire en me faisant des beaux yeux. Pris par surprise, j’enlève ma tuque et lui envoie moi aussi un beau sourire alors que je faisais les cent pas devant l’abribus en attendant le prochain pachyderme bleu articulé. J’aurais bien aimé lui parler, mais quelque chose – que je ne saurais nommer autrement que la gêne – m’en empêchait.
Le manège a duré un bon deux à trois minutes. Finalement, un autobus est arrivé, je suis monté dedans et je suis parti. J’ai envoyé un dernier sourire au jeune homme en lui faisant un clin d’oeil auquel il a répliqué par un dernier sourire et en un éclair nos destins se sont séparés sans doute à jamais.
Tout de suite après, j’ai regardé sur mon cellulaire ce qu’il y avait de bon à regarder via une application destinée à rencontrer des gens. Rien n’était différent de la fois d’avant que j’avais regardé. Toujours ces mêmes gens au regard livide, au visage peut-être beau, mais tellement rempli d’une insignifiance qui démontre qu’en réalité ils ne cherchent que de l’éphémère et/ou des pectoraux. J’ai bien tenté d’aller leur faire la conversation mais mes bonjours se heurtent toujours à leur vide superficiel.
Si d’un côté le virtuel me frappe à un mur, le réel m’envoie plein de signes et c’est comme si je faisais exprès de passer à côté. Ce jeune homme, je regrette de ne pas lui avoir dit au moins bonjour. Ça n’aurait probablement pas mené à grand chose, mais si on ne fait pas de pas en avant quand un semblant de chance se présente, c’est certain qu’on reste au point de départ.
Or, c’est un peu là où j’en suis en amour. Je peux bien avoir été célibataire depuis ma naissance, en agissant comme ça!…